Le syndrome du canal tarsien antérieur, également connu sous le nom de syndrome tarsien antérieur, bien que rarement évoqué en pratique clinique courante, est une pathologie neurologique localisée affectant la face dorsale du pied. Il résulte d’une compression du nerf fibulaire profond (ou péronier profond) dans un espace anatomique étroit situé sous le rétinaculum des extenseurs, en avant de l’articulation de la cheville. Ce nerf, branche terminale du nerf sciatique, joue un rôle essentiel dans la sensibilité du premier espace interdigitopal (entre le premier et le deuxième orteil) et participe au contrôle moteur des muscles extenseurs des orteils.

Lorsque ce nerf est comprimé, les patients peuvent ressentir des symptômes sensoriels tels que des douleurs localisées, des picotements, des brûlures ou encore des engourdissements sur la partie supérieure du pied. Ces manifestations sont souvent accentuées lors de la marche, du port de chaussures serrées ou d’activités impliquant une flexion répétée du pied. Dans certains cas, la force musculaire peut être affectée, altérant la qualité du mouvement de l’extension des orteils ou de la cheville.

Les causes de ce syndrome sont multiples : elles vont des anomalies anatomiques locales (comme un épaississement du rétinaculum ou la présence d’un ganglion) à des facteurs mécaniques tels que le port prolongé de chaussures trop étroites, des traumatismes directs, ou encore une inflammation chronique des tissus mous environnants. Les sportifs, les danseurs et les travailleurs effectuant des gestes répétitifs sont particulièrement à risque.

Ce syndrome est parfois confondu avec d’autres pathologies comme la neuropathie de Morton ou des atteintes lombaires, d’où l’importance d’un diagnostic différentiel rigoureux. Un examen clinique attentif, associé à des tests neurologiques et parfois une échographie de haute résolution ou une IRM, permet de confirmer l’atteinte du nerf fibulaire profond.

Malgré sa rareté, le syndrome du canal tarsien antérieur mérite l’attention des professionnels de santé, car une compression non traitée peut évoluer vers une chronicité handicapante. Une prise en charge précoce, alliant repos, adaptation du chaussage, traitement anti-inflammatoire, thérapie manuelle ciblée et renforcement musculaire, permet souvent d’éviter la chirurgie.

Bien que le syndrome du canal tarsien antérieur soit une affection relativement rare, certaines catégories de population sont plus exposées en raison de leurs habitudes, de leur morphologie ou de leurs activités professionnelles ou sportives. Identifier ces groupes à risque permet non seulement un dépistage plus précoce, mais aussi une prévention ciblée et une meilleure prise en charge thérapeutique.

Parmi les populations les plus concernées figurent d’abord les sportifs, en particulier ceux qui sollicitent intensément la flexion dorsale et plantaire du pied. Les coureurs de fond, danseurs, footballeurs, grimpeurs ou encore pratiquants de sports de raquette sont exposés à des microtraumatismes répétés sur la zone antérieure de la cheville. Ces gestes peuvent entraîner des inflammations locales, une hypertrophie des tissus, voire des compressions mécaniques sur le nerf fibulaire profond, responsable des symptômes.

Les travailleurs en station debout prolongée, comme les serveurs, enseignants, professionnels de santé ou ouvriers de chantier, sont également à risque. Le port de chaussures rigides ou de sécurité, associé à une posture statique, peut majorer les contraintes mécaniques sur la face dorsale du pied. De même, les personnes effectuant de nombreux accroupissements ou des flexions répétées du pied, comme les carreleurs ou certains techniciens, sollicitent fortement cette région.

Le sexe féminin constitue un autre facteur prédisposant, en partie à cause du port fréquent de chaussures étroites, à talons ou à lacets serrés, qui compriment directement la zone du canal tarsien antérieur. Cette pression prolongée augmente le risque d’irritation du nerf, surtout si la chaussure est portée au quotidien, sans alternance avec des modèles plus souples.

Par ailleurs, certaines morphologies du pied (pied creux, instabilité du médio-pied, hallux valgus) peuvent déséquilibrer les appuis et concentrer les contraintes mécaniques sur la partie antérieure du pied. Enfin, les personnes âgées ou atteintes de polyneuropathies, de diabète, ou de troubles circulatoires, présentent une sensibilité nerveuse accrue, rendant la compression plus symptomatique.

Il est donc crucial pour les praticiens de rester attentifs aux profils cliniques à risque, et de questionner les habitudes de vie, de chaussage, d’activité physique et de posture. Une approche ostéopathique préventive, intégrée à une évaluation biomécanique globale, permet non seulement d’anticiper l’apparition du syndrome, mais aussi d’éviter sa chronicisation.

Le nerf fibulaire profond, également appelé nerf péronier profond, est une structure nerveuse délicate qui traverse la partie antérieure de la cheville, juste sous le rétinaculum des extenseurs. Ce point de passage étroit, situé entre les tendons des muscles extenseurs et les structures osseuses, constitue une zone de vulnérabilité anatomique. Toute modification de cet équilibre peut entraîner une compression du nerf, donnant lieu au syndrome du canal tarsien antérieur.

Parmi les causes les plus fréquentes, on retrouve d’abord les anomalies anatomiques : épaississements du rétinaculum, varices, kystes synoviaux ou excroissances osseuses (exostoses) peuvent réduire l’espace disponible pour le nerf. Ces facteurs peuvent être présents dès la naissance ou se développer au fil du temps, notamment après des microtraumatismes répétés.

Visualisation du syndrome du tarsien antérieur, illustrant la compression du nerf fibulaire profond au niveau du cou-de-pied, juste sous le rétinaculum des extenseurs. Cette compression peut entraîner douleur, engourdissements ou faiblesse, principalement entre le premier et le deuxième orteil. L’image met en évidence le trajet nerveux à travers les structures ligamentaires et osseuses, soulignant la zone critique de conflit.

Ensuite, les traumatismes directs ou répétés jouent un rôle clé. Une entorse de cheville mal soignée, des microchocs répétés lors d’activités sportives comme la course à pied ou le football, ou encore le contact prolongé avec des équipements de protection (comme les protège-tibias) peuvent provoquer une inflammation locale et une fibrose progressive. Ces changements altèrent le glissement normal des structures tendineuses et exercent une pression constante sur le nerf.

Un autre facteur souvent négligé est le choix de chaussures inadaptées. Les chaussures trop serrées, à lacets très serrés ou à coque rigide au niveau du cou-de-pied, exercent une pression mécanique prolongée sur la zone de passage du nerf. Cela est particulièrement fréquent chez les patients pratiquant des activités sportives avec des chaussures de compétition rigides, ou chez les professionnels portant des bottes de sécurité.

De plus, des activités physiques intenses ou mal dosées peuvent provoquer une hypertrophie musculaire ou ligamentaire dans la région, réduisant l’espace anatomique du canal. Dans certains cas, une surcharge chronique des muscles extenseurs peut aggraver la tension sur le nerf.

Enfin, des conditions inflammatoires comme la ténosynovite ou la synovite articulaire peuvent générer un œdème local, augmentant la pression intra-canalaire et favorisant la compression nerveuse.

L’identification de la cause précise est essentielle pour orienter le traitement : un conflit mécanique aigu ne sera pas pris en charge de la même manière qu’une fibrose post-traumatique ou qu’une hypertrophie progressive. C’est pourquoi une évaluation fine des antécédents, des habitudes posturales et du chaussage fait partie intégrante de l’approche ostéopathique dans ce type de syndrome.

Le canal tarsien antérieur est un espace anatomique situé sur la face dorsale du pied, en avant de l’articulation de la cheville. Ce couloir étroit est formé par le rétinaculum des extenseurs, les os du tarse (notamment le col du talus et le naviculaire), et les tendons des muscles extenseurs. À l’intérieur de ce canal passent plusieurs structures importantes, dont le nerf fibulaire profond, qui se divise ensuite pour innerver l’espace entre le premier et le deuxième orteil. Ce nerf, bien que de petit calibre, est particulièrement vulnérable à la compression en raison de l’exiguïté du canal et de la proximité immédiate de tissus pouvant devenir hypertrophiés ou enflammés.

Lorsqu’une pression s’exerce sur le nerf fibulaire profond — que ce soit par une inflammation locale, une tension musculaire excessive, un kyste, ou un épaississement du rétinaculum — une irritation mécanique et chimique du nerf s’installe. Cette agression répétée génère une réaction en chaîne : production de médiateurs inflammatoires, œdème, et altération de la gaine de myéline qui entoure les fibres nerveuses. La situation est aggravée par l’apparition d’une ischémie (diminution de la vascularisation) du nerf, qui compromet son métabolisme cellulaire.

En réponse à cette agression, le nerf peut envoyer des signaux aberrants au cerveau, interprétés comme des douleurs, des brûlures, ou des décharges électriques. Cette hypersensibilité nerveuse est caractéristique des syndromes de compression chronique.

La compression prolongée du nerf fibulaire profond affecte en priorité la sensibilité cutanée dans la région dorsale du pied, notamment dans l’espace entre le premier et le deuxième orteil. Les patients décrivent souvent des picotements, une sensation de brûlure, voire une perte de sensation (« comme une zone morte »). Ce trouble sensitif peut être constant ou intermittent, et se majorer lors de l’activité physique ou du port de chaussures serrées.

À terme, des modifications de la carte sensorielle corticale peuvent apparaître. Même en l’absence de stimulus réel, le système nerveux central peut maintenir la perception de la douleur : c’est le phénomène de douleur neuropathique chronique. Dans ces cas, une simple pression ou un frottement léger peut devenir intolérable — on parle alors d’allodynie.

Ces phénomènes expliquent l’importance d’une prise en charge précoce et multidisciplinaire, où l’ostéopathie trouve sa place pour redonner de la mobilité, diminuer les tensions locales et restaurer un équilibre neuro-mécanique.

La compréhension des mécanismes physiopathologiques du syndrome du canal tarsien antérieur repose sur l’analyse précise de la relation entre les structures anatomiques du pied et le nerf fibulaire profond. Ce nerf traverse un canal étroit à l’avant de la cheville, sous le rétinaculum des extenseurs, en étroite proximité avec les tendons des muscles extenseurs, les vaisseaux et les structures osseuses environnantes.

Lorsque ce canal perd de sa souplesse ou que son volume diminue, le nerf peut être compressé ou étiré de façon répétée, générant une cascade de dysfonctionnements neurophysiologiques. La première conséquence de cette compression est une altération de la conduction nerveuse. Le nerf, irrité par une pression mécanique constante, devient hypersensible et transmet des signaux exagérés, souvent interprétés comme de la douleur, des brûlures, ou des fourmillements.

Cette situation est souvent aggravée par une inflammation locale. En réponse à la compression, les tissus environnants peuvent réagir par un œdème inflammatoire, accentuant la pression dans un espace déjà restreint. Ce cercle vicieux — compression, inflammation, œdème, puis recompression — contribue à l’irritation chronique du nerf.

Sur le plan microvasculaire, une ischémie nerveuse peut survenir. Le nerf comprimé ne reçoit plus un apport sanguin suffisant, ce qui affecte son métabolisme et sa capacité à régénérer ses fibres. À long terme, cela peut entraîner une dégradation de la gaine de myéline et une perte progressive de fonction nerveuse, avec une sensibilité altérée et, dans les cas les plus avancés, une faiblesse motrice des muscles innervés.

Il existe également une composante neurodynamique. Le nerf fibulaire profond, comme tous les nerfs périphériques, doit pouvoir glisser librement dans son trajet. Lorsqu’il est fixé par des adhérences ou comprimé dans un tunnel rigide, sa mobilité est compromise. Ce manque de glissement aggrave les symptômes dès que le pied est en mouvement, notamment en flexion dorsale, lorsque les tensions sur le nerf augmentent.

Enfin, la compression chronique modifie la plasticité centrale, c’est-à-dire la manière dont le système nerveux central perçoit les signaux venant du pied. Même en l’absence de stimulus réel, le cerveau peut continuer à interpréter la zone comme douloureuse — un phénomène bien connu dans les douleurs neuropathiques chroniques.

Ces mécanismes justifient une approche de traitement multimodale : libération des tensions mécaniques, amélioration de la microcirculation, et travail sur la régulation neuro-végétative via des techniques manuelles spécifiques. En ostéopathie, la finesse de palpation et la vision globale du patient permettent de cibler ces processus à différents niveaux.

L’évaluation clinique du syndrome du canal tarsien antérieur commence par un interrogatoire minutieux. Le praticien recherche la présence de douleurs dorsales du pied, de paresthésies entre le premier et le deuxième orteil, et identifie les facteurs aggravants (chaussures serrées, activité physique, position prolongée debout). L’anamnèse explore aussi les antécédents de traumatismes locaux ou de pathologies inflammatoires.

L’examen physique se concentre sur la palpation du rétinaculum des extenseurs et la reproduction des symptômes à la pression ou à la mise en tension du nerf. Le test de percussion localisé peut provoquer une sensation de choc électrique irradiant vers les orteils (signe de Tinel positif).

Lorsque le diagnostic reste incertain, on a recours à l’imagerie médicale. L’échographie musculosquelettique permet de visualiser un épaississement du rétinaculum, un kyste synovial, ou une inflammation locale. L’IRM peut être utile pour confirmer une compression nerveuse et exclure d’autres étiologies (tumeurs, anomalies osseuses). Une électromyographie (EMG) peut aussi évaluer la conduction nerveuse et la sévérité de l’atteinte.

Dans les formes modérées, un traitement conservateur bien conduit suffit souvent à soulager les symptômes. Le repos est essentiel, accompagné d’un ajustement du chaussage : on privilégiera des chaussures larges, souples, sans pression sur le cou-de-pied.

Les orthèses plantaires peuvent corriger un trouble de la statique plantaire qui majore les contraintes mécaniques. Des coussinets de protection dorsale peuvent également répartir la pression au niveau du rétinaculum.

Sur le plan médicamenteux, les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont prescrits en phase aiguë. Des vitamines neurotropes (B1, B6, B12) peuvent aussi soutenir la régénération nerveuse.

Enfin, l’ostéopathie joue un rôle clé dans la régulation des tensions musculo-fasciales et dans la restauration du glissement neurodynamique du nerf fibulaire profond.

Si les traitements conservateurs échouent après plusieurs semaines, on envisage des infiltrations de corticostéroïdes. Elles permettent de réduire localement l’inflammation et de décomprimer le nerf.

En dernier recours, notamment si une anomalie anatomique majeure est présente, une intervention chirurgicale de libération du canal tarsien antérieur peut être proposée. Cette procédure consiste à sectionner le rétinaculum des extenseurs ou à retirer les structures compressives.

Une prise en charge pluridisciplinaire, associant podologue, médecin du sport, ostéopathe et chirurgien orthopédiste, offre les meilleures chances de récupération durable.

En conclusion, le syndrome du canal tarsien antérieur représente une pathologie spécifique du pied, définie par la compression du nerf fibulaire dorsal. Cette condition engendre une variété de symptômes affectant la partie supérieure du pied, tels que douleur, picotements, sensations de brûlure et engourdissements. La physiopathologie de cette affection implique une compression du nerf, souvent attribuable à des facteurs anatomiques, des traumatismes ou des inflammations locales.

Le diagnostic du syndrome du canal tarsien antérieur nécessite une évaluation approfondie comprenant des antécédents médicaux, un examen physique détaillé, et parfois des examens d’imagerie pour confirmer la compression nerveuse. En termes de traitement, des approches variées, allant de mesures conservatrices à des interventions plus invasives, sont disponibles selon la gravité des symptômes et la réponse du patient aux traitements.

La gestion réussie de cette pathologie repose sur une approche individualisée, prenant en compte la diversité des facteurs contributifs et des présentations cliniques. La collaboration étroite entre les professionnels de la santé et le patient est cruciale pour élaborer un plan de traitement optimal et améliorer la qualité de vie du patient affecté par le syndrome du canal tarsien antérieur.

En somme, la compréhension approfondie de la physiopathologie, le diagnostic précoce et la mise en œuvre de stratégies thérapeutiques adaptées sont essentiels pour une prise en charge efficace de cette condition spécifique du pied. La recherche continue dans le domaine médical contribue à élargir nos connaissances et à perfectionner les approches diagnostiques et thérapeutiques pour optimiser les résultats chez les patients atteints du syndrome du canal tarsien antérieur.

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